Le village céramique de Phù Lang hier et aujourd’hui
À 60 km au nord de Hanoi, le village de Phù Lang (province de Bac Ninh, Nord) est tranquillement posé au bord de la rivière Câu. Il est surtout connu pour ses potiers et ses céramistes qui utilisent encore les techniques traditionnelles pour la forme et les glaçures de leurs produits.
Phù Lang est l’un des 3 plus anciens centres de poterie du delta du fleuve Rouge avec Thô Hà et Bát Tràng. Situé au bord de la poétique rivière Câu, il et un lieu empreint d’une grande simplicité comme le Vietnam d’autrefois. Le long de cette rivière, il existe plusieurs dizaines de villages artisanaux qui constituent le berceau de la civilisation du delta du fleuve Rouge.
Phù Lang garde une beauté simple et l’ambiance paisible des villages d’antan avec ses ruelles en zigzag, ses murs de briques rouges et les immuables scènes de la campagne vietnamienne. Autrefois, il était divisé en 3 : Haut-Phù Lang (Phù Lang Thuong), Moyen-Phù Lang (Phù Lang Trung) et Bas-Phù Lang (Phù Lang Ha). D’après certaines légendes que colportent quelques “têtes chenues”, le métier de céramiste du village de Phù Lang serait apparu sous la dynastie des Ly (1010-1225) grâce à des mandarins qui auraient appris les techniques en Chine avant de les transmettre à ces villageois.
Phù Lang est connu depuis des siècles pour ses poteries brutes et rugueuses à l’émail brun clair, appréciées pour leur rusticité comme pour leur prix abordable. Toute la production se fait encore “à l’ancienne”, au tour, si bien qu’il n’y a pas deux poteries identiques. “C’est dans les années 1950-1970 que Phù Lang a connu son âge d’or”, explique Pham Van Hoan, l’un de ces céramistes et titulaire du prestigieux titre d'”Artisan aux mains d’or”. À cette époque, on faisait la queue sur les quais pour charger des tonnes de céramiques qui étaient expédiées par voie fluviale dans de nombreuses localités : Phu Tho, Yên Bai, Lào Cai (via le fleuve Rouge) ; Tuyên Quang (rivière Claire) ; Thai Nguyên, Bac Giang (rivière Câu) ; Bô Ha (rivière Thuong) ; Hai Phong, Ninh Giang, Thanh Hoa (fleuve Thai Binh) ; Hoà Binh et Son La (rivière Noire).
Aujourd’hui, Phù Lang n’a plus de mines d’argile, celle-ci est donc ramenée d’ailleurs par bateau. Les impuretés sont soigneusement éliminées afin d’obtenir une glaise fine et liante. En général, le modelage nécessite l’intervention de 2 personnes, l’une fait tourner un guéridon rotatif avec ses pieds tandis que l’autre travailler l’argile. C’est là la partie la plus difficile, et c’est à ce moment-là que les touristes ont souvent besoin de l’assistance de professionnels lorsqu’ils s’essayent à la poterie.
Une fois la forme réalisée, les poteries crues sont séchées en plein air par le soleil et le vent. Elles sont ensuite lissées avant embellissement, l’activité la plus attrayante pour les apprentis. Ces derniers laissent leur créativité s’exprimer à travers peinture, gravure, découpe, déformation et émaillage.
L’émail de Phù Lang, sans quoi toute poterie ne serait pas une poterie, résulte d’une concoction savante de cendre d’une plante forestière, de chaux, de pâte de pierre et de boue d’alluvion. Bien sûr, la recette est un secret familial jalousement gardé, car dans ce village, on est fier de ces couleurs brunâtres, jaunâtres et jaune foncés. Ensuite, les produits semi-finis sont empilés dans un four pour une cuisson réalisée exclusivement au bois. Selon des céramistes expérimentés, les fours modernes, qui fonctionnent au gaz, enlèvent la beauté champêtre des produits de Phù Lang.
(Lecourrier)